J’ai peut-être fini par prendre le rythme : ce matin, les premières odeurs de fumée de bois du feu des chameliers m’ont éveillée, dès 6h. Voici donc le dernier matin au milieu des sables. Notre itinéraire nous fait remonter une première vallée, encadrée de hautes falaises de schiste noir. Les empilements d’assiettes qui subsistent ça et là sur les crêtes déchiquetées stimulent l’imaginaire : voici une tête de chameau, et là, son chamelier endormi dans son chech… Une entaille profonde dans cette muraille nous permet de rejoindre sans plus d’effort l’oued parallèle au nôtre. Nous sommes tous assez silencieux, contemplant encore de tous nos yeux ces espaces mystérieux, tout en contrastes et en lumière.

Quelques pas encore, et nous atteignons l’extrémité du plateau de grès argileux. Pour continuer, il faut descendre un entonnoir de sable orangé, afin d’atteindre le goulet où nous attend le trésor du désert : Terjit. Au fond de la combe, des tiges de palmiers semblent déborder vers le sable, comme poussées hors de leur limite par une force invisible. Quelques escaliers dans la falaise nous font franchir le dernier verrou.
Derrière le rideau végétal, le spectacle est merveilleux pour nos yeux maintenant accoutumés à l’aridité minérale. Sur son lit d’argile, l’eau. L’eau qui jaillit d’une faille schisteuse et s’écoule, limpide et éclatante, baignant les mousses et abreuvant les petites fougères abritées par les hautes frondaisons des dattiers. A gauche, l’eau est fraîche. A droite, elle sort de la roche à la température d’un bain relaxant, tiède et généreuse. Les deux cours se rejoignent en un bassin où les petits poissons ajoutent les éclats de leurs écailles au jeu des rayons de soleil reflétés par l’eau.

Et quel délice pour les oreilles, ce clapotis clair et régulier du ruisseau poursuivant sa descente vers le petit village dont nous apercevons quelques murs. Tout est fraîcheur, tout est verdure. Les mousses tapissent les à-pics noirs de l’étroit canyon où jaillit cette exubérance de vie. De larges stalactites pendent des surplombs, filtrant goutte à goutte l’eau de la source invisible, la guidant jusqu’au sol, parfaitement fraîche et pure. La boire est un délice, qui fait oublier l’eau toujours un peu terreuse des puits et forages trouvés sur la piste caravanière.
Après les 6 jours de marche, quel bonheur de se laisser couler dans le courant tiède et translucide, sentir la poussière nous quitter, le sel disparaître de notre visage, le sable de nos cheveux lavé. Chacun s’allonge à tour de rôle dans le petit bassin pour passer sa tête sous la cascade bienfaisante. L’eau, trésor précieux, apaisement du corps et douceur pour l’âme. Merveilleux cadeau, qui clôt en beauté notre découverte du désert.

Quelques centaines de mètre plus loin, le désert a repris ses droits, l’eau s’est enfouie à nouveau… L’oasis de Terjit n’était-elle qu’un rêve éveillé, notre puits au milieu du désert ?
Bravo
Un vrai bonheur de vous suivre , de vous lire et de vous écouter aussi sur Youtube !
Vous savez faire partager vos découvertes, les paysages sont magnifiques …
Que de belles découvertes , en famille!
Encore bravo et merci
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J’ai déjà fait assez souvent des commentaires sur les récits de Yannick votre mari et sur ceux de vos trois enfants mais moins souvent sur les vôtres. Je ne vous ai rencontrée qu’une seule fois, il y a déjà 14 ans, à Bourg St Maurice, lors de la « semaine de la solidarité internationale » lorsque nous vous avions invités Yannick et vous à faire le récit à deux voix de votre voyage en vélo de Chambéry au Malawi / Cap de Bonne-Espérance. J’avais été très impressionné et très intéressé alors de vous entendre et j’avais beaucoup aimé la forme simple et claire que vous aviez retenue pour ce faire. À l’époque vous n’aviez pas encore d’enfant, maintenant vous en avez trois et ils sont avec vous dans le désert de Mauritanie après avoir pédalé comme vous jusque là et on voit sur la photo d’aujourd’hui qu’ils sont heureux et qu’ils vivent une expérience qu’ils n’oublieront plus jamais. Merci pour votre description d’aujourd’hui de l’oasis, petit miracle au milieu du désert, et merci pour la joie de vivre qui ressort de tous vos récits, ceux de vos enfants, ceux de Yannick et les vôtres. Pierre Rabhi a dit qu’il appartient à chacun de contribuer à créer des « oasis en tous lieux » ; ça n’est pas simple, il y a d’énormes contradictions mais ce que vous avez entrepris va bien dans ce sens ! Si je comprends bien vous venez d’entrer au Sénégal, le traverser du nord au sud pour arriver à Bignona en Casamance aux environs de Noël… Puis ensuite, retour en France avant la rentrée scolaire de janvier au milieu des froidures de Savoie… Alors belle route encore pour vous tous. J’aurai encore du plaisir à vous lire régulièrement (de ce point de vue les moyens techniques de communication actuels – malgré les dérives toujours possibles – ont quelque chose de merveilleux). Joseph
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Merci Marie Hélène pour cette délicieuse plongée dans votre oasis ! Quel dépaysement et que de chemin parcouru !!
Bravo pour votre plume à tous ! Vous nous faites du bien !!
Bon courage pour la dernière séquence sénégalaise …
Laurent
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Bonjour Marie Helene! En suivant les avancées et recits de la famille , j etais curieuse d entendre votre propre voix , a la fois pleinement actrice de cette aventure pour elle meme , mais aussi tellement reliée a ses trois « rejetons « »… d ou mon grand plaisir a la lecture de cette fraiche étape en oasis ..avec un tres beau style poetique ..Merci et encore bravo a toutes et tous !
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